Les ciseaux d'Anastasie
L’Index librorum prohibitorum (Index des livres interdits),, est un catalogue instauré à l'issue du Concile de Trente (1545-1563). Il s'agit d'une liste d'ouvrages que les catholiques romains n'étaient pas autorisés à lire, des « livres pernicieux », accompagnée des règles de l'Église au sujet des livres. Le but de cette liste était d'empêcher la lecture de livres jugés immoraux ou contraires à la foi.
Depuis la « Notification de la suppression de l'index des livres interdits », émise par le Vatican en 1966, cet index perd son caractère obligatoire et n'a plus valeur de censure, même s'il reste un guide moral.
Le premier Index romain fut publié pendant le Concile de Trente par le pape Paul IV en 1559 à la demande de l'Inquisition, et confirmé en 1564.
La Congrégation de l'Index fut instituée en 1571. L’Index fut régulièrement mis à jour jusqu'en 1961, par ajout de la Congrégation de l'Inquisition ou du pape. La liste n'était pas un simple travail de réaction ; les auteurs étaient invités à défendre leurs travaux, qu'ils pouvaient corriger et rééditer s'ils désiraient éviter l'interdiction, et une censure avant publication était encouragée.
En 1948, la 20e et dernière édition contenait quatre mille titres indexés et répertoriés sous des raisons diverses : hérésie, immoralité, licence sexuelle, théories politiques subversives, etc. On y trouvait des écrivains et des philosophes connus tels que Montaigne, Diderot, Rousseau, Descartes, Montesquieu, Laurence Sterne, Voltaire, Daniel Defoe, Balzac, Larousse pour son Dictionnaire du XIXe siècle, André Gide (pour l'ensemble de son œuvre, en 1952), ainsi que le sexologue hollandais Theodor Hendrik van de Velde, auteur du manuel sur la sexualité Le Mariage parfait.
Presque tous les philosophes occidentaux ont été inclus dans l’Index — même ceux qui croyaient en Dieu, tels que Descartes, Kant, Berkeley, Malebranche, Lamennais et Gioberti. Les athées, tels que d'Holbach, le marquis de Sade, Schopenhauer et Nietzsche, ne sont pas inclus en raison de la règle tridentine que les œuvres hérétiques (qui contredisent le dogme catholique) sont ipso facto interdites. Le naturaliste Buffon y échappa grâce à ses rétractations. Quelques œuvres importantes ne sont pas incluses, simplement parce que personne ne s'est soucié de les dénoncer.( Darwin ne fut jamais mis à l’Index.)
La mise à l’Index la plus célèbre dans l’histoire de l’Église est probablement celle des écrits de Copernic (1473-1543) sur l'héliocentrisme (5 mars 1616). La condamnation de Galilée intervint dans ce contexte, même si l'on n'est pas tout à fait sûr, aujourd'hui, que la raison réelle et complète de la condamnation était bien celle-là. Les ouvrages de Copernic et celui de Galilée ont été rayés de l'Index, partiellement en 1757, et définitivement en 1835.
« Parmi tous les écrits présents dans l'Index, la Bible avec ses adaptations, ses commentaires et les études bibliques, est de loin le livre le plus censuré jusqu'à la suppression de l'Index. Les éditions de la Bible en latin, en grec, dans les langues vulgaires en tout ou en partie, ainsi que des commentaires bibliques figurent nombreux dans le premier index roman. L'interdiction, maintenue pendant deux siècles, d'adapter la bible en langue vulgaire finit par assimiler dans l'imaginaire collectif les traductions bibliques aux livres hérétiques, dit Gigliola Fragnito. Plusieurs raisons justifiaient ces interdictions aux yeux des censeurs, principalement l'existence d'éditions altérées et commentées par des hérétiques, et la méfiance à l'égard d'une interprétation personnelle du texte révélé, que seule l'Église pouvait interpréter d'une façon authentique. Le contact direct avec les sources de la foi pouvait provoquer des remises en question et altérer la doctrine, la morale, et l'organisation de l'Église. »
Certaines mises à l’Index furent de nature politique : dès 1559, Le Prince de Machiavel fut mis à l'index.
En 1909, par une lettre pastorale, 80 évêques et archevêques de France mirent à l'index un certain nombre de manuels scolaires, notamment d'histoire, en particulier ceux qui mettaient en doute que Jeanne d'Arc ait réellement "entendu des voix".
En 1917, le pape Benoît XV, par le motu proprio Alloquentes Proxime, supprime la Congrégation de l'Index et confie la mise à jour de l'Index librorum prohibitorum à la Congrégation du Saint-Office, aujourd'hui Congrégation pour la doctrine de la foi.
En 1926, le journal l’Action française, mouvement nationaliste et royaliste, y fut ajouté. Bien qu'on n'y trouve pas d'ouvrages de personnages comme Adolf Hitler ou Joseph Staline, on y trouve Le Mythe du vingtième siècle d'Alfred Rosenberg, considéré comme le livre fondateur du nazisme avec Mein Kampf. On a pris le soin d'y condamner en latin l'anarchiste Edgar Bauer, aujourd'hui relativement oublié, mais non son frère aîné, Bruno Bauer, pour qui Jésus n'avait jamais existé. La Congrégation de l'Index n'était pas une mécanique impeccablement huilée mais une administration comme une autre.
Le dernier livre mis à l’Index l'a été, en 1961, sous le pontificat de Jean XXIII : il s'agit de La Vie de Jésus de l'abbé Jean Steinmann.
La toute dernière édition (la 20e) est parue en 1948, et l’Index lui-même a été définitivement aboli le 14 juin 1966 par le pape Paul VI.
Les effets de l’Index se firent sentir d'un bout à l'autre du monde catholique. Pendant longtemps, au Québec ou en Pologne par exemple, il était difficile de trouver des copies des ouvrages interdits, particulièrement en dehors des villes importantes. L’Index cessa d'être une liste officielle le 14 juin 1966, sous Paul VI, après le concile de Vatican II.
L'expression « être mis à l'Index » signifie « être exclu ». Son origine est directement liée à l'Index décrit dans cet article.
Actuellement, l'index est devenu inutile, le formatage idéologique le remplace avantageusement, on ne lit, écoute et regarde que ce qui est conforme à la pensée acquise et figée,. L'esprit sectaire permet de dénigrer ce qu'on n'a pas lu, ni même entendu. Le docufiction émotionnel autorise à croire qu'on connait l'histoire sans l'explorer, les écrivains sans les lire. La plus grande réussite de ces 70 ans de servitude américaine "tendance efficacité marketing", a été la destruction de l'esprit critique, l'abolition de la curiosité, du jugement sur pièce, grâce au reader's digest médiatique, qui permet de tout survoler dans rien savoir en profondeur. Et de s'estimer documenté. Le temps de cerveau didponible et vraiment réservé à la propagande.
Ce n'est pas le rire qui est le propre de l'homme, c'est sa vulnérabité conformiste ! Notre cerveau est une éponge, elle absorbe tout sans discernement.
La curiosité est la plus grande qualité, sans laquelle on végète dans le bouillon initial.
Plus besoin de ciseaus d'Anastasie, ils tranchent et censurent eux-mêmes.
Quelques écrivains ou savants notables dont des œuvres figurent ou ont figuré dans l’Index librorum prohibitorum :
Jean le Rond d'Alembert
Gabriele D'Annunzio
Francis Bacon
Honoré de Balzac
Charles Baudelaire
Pierre Bayle (philosophe)
Simone de Beauvoir
Henri Bergson
George Berkeley
François Broussais
Thomas Browne
Giordano Bruno
Jean Calvin
Giacomo Casanova
Pierre Charron
Auguste Comte
Condillac
Condorcet
Nicolas Copernic
Léon Daudet
Erasmus Darwin
Daniel Defoe
René Descartes
Denis Diderot
Alexandre Dumas, père
Alexandre Dumas, fils
Érasme
Fénelon
Gustave Flaubert
Fontenelle
Charles Fourier
Anatole France
André Gide
Graham Greene
Victor Hugo
David Hume
Emmanuel Kant
Johannes Kepler
Jean de La Fontaine
Alphonse de Lamartine
Félicité Robert de Lamennais
Pierre Larousse
Martin Luther
Nicolas Machiavel
Moïse Maïmonide
Curzio Malaparte
Nicolas Malebranche
Charles Maurras
Jean-Henri Merle d'Aubigné
Jean Meslier
Jules Michelet
Montaigne
Montesquieu
Alberto Moravia
Blaise Pascal
Pierre-Joseph Proudhon
Edgar Quinet
Ernest Renan
François Rabelais
Jean-Jacques Rousseau
Saint-Simon
Charles-Augustin Sainte-Beuve
George Sand
Jean-Paul Sartre
Baruch Spinoza
Stendhal
Eugène Sue
Jonathan Swift
Hippolyte Taine
Voltaire
Émile Zola
On peut en ajouter....